Blog
Actus
7 minutes de lecture

La fast-fashion va-t-elle finir par passer de mode ?

La mode jetable mise à l’amende par l’Assemblée nationale

Le 14 mars 2024, l’Assemblée a adopté à l’unanimité une loi historique pour « démoder la fast-fashion ». Ce texte, porté par la députée Horizons Anne-Cécile Violland et soutenu par le Ministre de la Transition Ecologique Christophe Béchu, s’inscrit dans la continuité des lois « Anti-gaspillage » de 2020 et « Climat et Résilience » de 2021, qui prévoient notamment la mise en place d’un affichage environnemental, appelé « éco-score » dans plusieurs secteurs de l’industrie.

Que contient cette proposition de loi ? 🧑‍⚖️

  • L’introduction dans le Code de l’Environnement de la définition de « Fast-fashion » comme s’agissant d’une pratique commerciale mettant à disposition un nombre élevé de nouvelles références neuves chaque année. Le texte prévoit que soit fixé par décret les seuils à partir desquels une entreprise sera considérée comme relevant de la fast-fashion. La charge de l’application de ces seuils chiffrés par le gouvernement n’a pas été validée par les députés, cependant ils ont élargi par amendement la définition des activités concernés en ajoutant les plateformes de revente (type marketplace comme Temu) permettant de passer commande à plusieurs vendeurs. Les députés ont également précisé que le texte ne concernera pas le marché de la seconde main et le destockage des invendus par des vendeurs tiers.
  • L’interdiction, à partir du 1er janvier 2025, de toute forme de publicité visant à promouvoir les produits, les entreprises, les enseignes ou les marques de fast-fashion, y compris par des influenceurs
  • L’obligation, pour les entreprises de vente en ligne, de sensibiliser les consommateurs par l’affichage de l’impact environnemental des produits vendus et d’encourager à de meilleurs pratiques de consommation (sobriété, réparation, réemploi, recyclage). Ces informations devront être affichées à proximité du prix de vente.
  • La création, dès 2025, d’une prime ou d’une pénalité financière pour les produits textiles et les accessoires, en fonction de leur éco-score. Cette méthode de notation des produits et services en fonction de leur impact environnemental est en expérimentation depuis 2020 dans le secteur de l’industrie textile et devrait être mis en place d’ici la fin de l’année 2024. Le « malus » écologique s’élèvera à 5 euros par produit en 2025, puis augmentera graduellement jusqu’à atteindre les 10 euros en 2030. L’objectif annoncé de ces pénalités est de compenser les externalités économiques des entreprises de la fast-fashion et de financer des bonus pour les entreprises vertueuses de l’industrie du textile.

La mise en place de l’affichage de critères sur le respect des droits humains n’a pas été validée par les députés, cependant le Ministre de la Transition Ecologique a annoncé lancer dans les prochains mois un chantier pour construire des indicateurs sociaux et écologiques visant à mieux informer les consommateurs. Par amendement, les députés ont également ajouté une disposition pour compléter l’affichage environnemental en intégrant un critère de durabilité.

La prochaine étape avant application est l’examen de la proposition de loi par le Sénat.

Quel avenir pour le secteur de la mode ? 🤔

Une loi visant à « réduire l’impact environnemental de l’industrie textile » peut-elle vraiment freiner le modèle de fast-fashion ? Cette loi permettra-t-elle aux consommateurs de se tourner davantage vers des marques durables et respectueuses de l’environnement ? Une chose est sûre, la loi ne changera pas tout. Il est donc essentiel de guider les entreprises du secteur à transformer leur modèle pour changer les habitudes de consommation et renverser la tendance actuelle, dominée par la mode jetable.

1. Les dessous du secteur de la mode

La mode, souvent associée à l’expression de soi et au renouveau constant, cache en réalité une face sombre, celle de l’une des industries les plus polluantes au monde. Avec ses 4 milliards de tonnes de CO2 équivalent émis annuellement, elle se classe parmi les principaux contributeurs au changement climatique. De plus, elle se hisse au 3e rang des secteurs les plus consommateur en eau douce, juste derrière les cultures de blé et de riz. La mode semble laisser une empreinte néphase pour notre planète, sur l’ensemble de sa chaîne de valeur : de la production à l’utilisation en passant par la fabrication.

Exploiter massivement des matières premières 🐑 🧶

Les matériaux omniprésents dans nos vêtements, tels que le polyester, le coton, la viscose, le lyocell et la laine, engendrent des conséquences écologiques alarmantes. Tandis que certains, comme le polyester, la viscose et le lyocell, dépendant du pétrole pour leur production de fibres synthétiques, d’autres, comme la laine et le coton, nécessitent une quantité astronomique d’eau et l’usage intensif de produits chimiques sur de vastes étendues de terres.

Environ 4% de l’eau potable disponible est détournée pour la production de nos vêtements, une réalité d’autant plus préoccupante dans les régions où l’eau est une ressource rare. L’impact est non seulement écologique, mais aussi social, car cela affecte l’accès à l’eau pour d’autres usages vitaux, tels que l’agriculture et la consommation humaine.

Sacrifier l’environnement et la main d’œuvre dans la fabrication ❤️‍🩹

La poursuite effrénée de la production à bas prix et de la diversification des modèles entraîne des sacrifices considérables. Les fabricants, pour répondre à cette demande, recourent à des pratiques néfastes tant pour l’environnement que pour les travailleurs. Des substances toxiques utilisées dans le processus de teinture des vêtements contaminent les eaux et affectent la santé des travailleurs qui les manipulent ainsi que celle des consommateurs. En effet, 20% de la pollution des eaux dans le monde est attribuable à la teinture et au traitement des textiles.

Ademe_Infographie.png

Le choix des lieux de production répond à des critères économiques, sacrifiant souvent les normes environnementales et les droits des travailleurs. Les multinationales, en externalisant leur production dans des pays à faible coût de main-d’œuvre et à réglementation laxiste, contribuent à perpétuer ce cycle destructeur.

Consommer une mode jetable et polluante 🚮

La frénésie de la mode jetable alimente une culture de surconsommation. En France, chaque individu achète en moyenne 9,5 kg de textiles et de chaussures par an, mais n’en trie que 3,4 kg. Cette surabondance de vêtements, souvent destinée à une utilisation éphémère, aboutit à une montagne de déchets textiles. En Europe, 80% de ces déchets sont envoyés aux ordures ménagères et finissent par être incinérés, émettant ainsi davantage de gaz à effet de serre.

Ademe_Infographie 2.png

Avec son modèle actuel dominé par les marques de fast-fashion, le secteur du textile semble jouer dangereusement avec les limites planétaires : changement climatique, biodiversité, cycle de l’eau douce etc. En somme, un Bilan environnemental pas très positif. Comment peut-on transformer le secteur ?

2. Un guide pour décarboner le secteur

Les enseignes de prêt-à-porter peuvent-elles réduire leurs émissions de gaz à effet de serre ? Comment décarboner le secteur de l’industrie textile qui consomme 4 milliards de tCO2 eq par an ?

Les acteurs qui définissent les tendances dans notre dressing peuvent participer à la neutralité carbone, avec la Net Zero Initiative. ♻️

Selon le GIEC (groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat), il est nécessaire d’atteindre la « neutralité carbone » avant la moitié du siècle pour respecter l’Accord de Paris. Cependant, le concept de neutralité des entreprises, reposant aujourd’hui principalement sur la compensation carbone, n’est pas à la hauteur du défi climatique. C’est dans ce contexte que le projet Net Zero Initiative est né, porté par Carbone 4 et soutenu par l’ADEME et le Ministère de la Transition Écologique, en proposant un référentiel de contribution des organisations à la neutralité carbone co-construit avec un panel d’experts de haut niveau. Mettant l’action à l’honneur, ce document fourni un cadre aux entreprises qui souhaitent piloter leur action climatique pour s’aligner sur les objectifs de neutralité à l’échelle planétaire.

La méthodologie s’appuie sur 3 piliers pour atteindre la neutralité carbone :

  • La réduction des émissions de gaz à effet de serre directes et indirectes des entreprises
  • La contribution des entreprises à la réduction des émissions de GES, en commercialisant des solutions bas carbone ou en finançant des projets bas carbone
  • L’augmentation des puits de carbone par les entreprises, en développant l’absorptions du carbone par ses propres activités ou en finançant des projets de puits de carbone

Référentiel NZI.png

Le « pilier B » du référentiel Net Zéro pose un cadre pour la mesure des émissions évitées par les entreprises, grâce au développement de nouveaux produits ou services moins carbonés par rapport aux solutions existantes (scénario de référence). L’objectif de l’évaluation des émissions évitées est d’inciter les organisations à augmenter leur contribution aux objectifs de décarbonation.

Pour accompagner la réduction des émissions de gaz à effet du secteur de l’habillement, Carbone 4 a publié en décembre 2023 le premier guide sectoriel du Net Zero Initiative. Celui-ci vise à proposer un cadre méthodologique commun pour la mesure des émissions évitées par les entreprises qui contribuent à décarboner notre dressing.

Ils doivent surtout inverser la tendance (de la fast fashion) et prôner de nouveaux modes de consommation plus sobres 🌱

Capture d’écran 2024-03-28 à 11.09.25.png

Le premier constat posé par l’étude est l’absolue nécessité de réduire en volume la production de vêtement d’ici 2050 pour atteindre les objectifs carbone de l’industrie de la mode. Pour cela, la contribution des consommateurs est indispensable : nos modes de consommation de vêtement doivent évoluer.

  • Réduire la taille de notre garde-robe
  • Privilégier les alternatives bas carbone
  • Augmenter la durée de vie des pièces possédées
  • Augmenter le nombre d’utilisation et la durée de vie des pièces possédées, notamment par la réparation, la location etc.
  • Acheter et revendre, à volume identique, des vêtements de seconde main pour augmenter leur nombre d’utilisation
Portrait - site internet (2).png

Ainsi, pour tenir les objectifs de l’accord de Paris (maintenir un réchauffement climatique à un maximum de +1,5°), le volume de vêtements neufs devra être réduit à moins d’une pièce neuve par personne et par an, d’ici 2050.

Capture d’écran 2024-03-28 à 11.16.30.png

3. Concevoir une mode plus durable

Valoriser les entreprises avec les émissions évitées 💡

Pour valoriser les entreprises du secteur de l’habillement oeuvrant pour des nouveaux modes de consommation permettant d’atteindre un niveau de consommation de textile qui soit soutenable, le guide Net Zero Initiative propose une méthodologie complète et surtout commune à l’ensemble des acteurs, pour mesurer l’impact positif de ces nouvelles offres.

Ainsi, les entreprises innovantes et aux produits bas carbone pourront valoriser à travers une étude d’émissions évitées, les gains d’efficacité en matière d’émissions par rapport à la situation de référence (en l’absence de ces nouvelles solutions).

Attention au Greenwashing 🟩

Pour éviter les risques de greenwashing et les effets rebonds potentiels associés à de nouveaux produits ou services visant à décarboner la production de vêtements, le référentiel de la Net Zero Intitiative exclut certaines pratiques commerciales spécifiques. Les marques dont le modèle commercial repose sur les critères suivants ne sont pas éligibles à l’évaluation des émissions évitées :

  • Un renouvellement de collections trop fréquent (plus de 4 collections par an) et des références disponibles pour moins de 6 mois
  • Un nombre de référence élevé (5 000 références maximum, ou 15 000 si leur nombre est décroissant chaque année)
  • L’utilisation de promotions
  • Un prix de vente inférieur au coût de réparation de la pièce
  • Une pratique de communication utilisant les codes du greenwashing
  • L’incitation à acheter neuf, quand bien même des solutions pour allonger la durée de vie de l’existant (seconde-main, location, réparation) sont proposées

On vous aide à décupler votre impact positif

La réduction des émissions de gaz à effet de serre dans le secteur de l’habillement est cruciale pour atteindre les objectifs climatiques mondiaux. Rappelons l’ambition : maintenir un réchauffement climatique en dessous de +1,5°C. Pour l’atteindre, nous aurons besoin de la contribution de tous les secteurs économiques, y compris la mode qui influence si facilement les codes culturels de toute la planète.

Si on se penche sur l’actualité, la nouvelle loi française sur la fast-fashion semble répondre à une première question essentielle : Pourquoi devons-nous réinventer le modèle ? Cependant, une seconde interrogation, moins évidente subsiste : Comment réaliser cette transformation de manière rapide et efficace ?

C’est là que l’expertise en stratégie climat intervient. Pour commencer, nous vous recommandons vivement de consulter le Guide de la Net Zero Initiative, qui offre un cadre méthodologique précieux. Vous pouvez également compter sur l’expertise de nos consultants dans l’accompagnement de votre stratégie de réduction de GES et l’analyse des émissions évitées. Une expertise qui ne se limite pas au textile et qui concerne tous les secteurs.

Que vous soyez du secteur du textile et de l’habillement ou non, Impakt peut vous accompagner sur la mesure de vos émissions évitées, pour valoriser vos produits et services qui proposent des solutions moins carbonés aux solutions existantes.

N’hésitez pas à nous contacter si vous souhaitez échanger avec nos experts sur le sujet. 📧

Les sources

Introduction :

https://www.lcp.fr/actualites/fast-fashion-une-proposition-de-loi-contre-la-mode-jetable-votee-a-l-assemblee-nationale

https://www.vie-publique.fr/loi/293332-proposition-de-loi-fast-fashion-impact-environnemental-mode-jetable#:~:text=la%20mode%20%C3%A9ph%C3%A9m%C3%A8re.-,Interdiction%20de%20la%20publicit%C3%A9%20sur%20la%20fast%20fashion,ou%20marques%20de%20fast%20fashion.

Partie 1 : Les dessous du secteur de la mode

https://multimedia.ademe.fr/infographies/infographie-mode-qqf/

https://www.oxfamfrance.org/app/uploads/2022/03/Fast-Fashion-Impacts-alternatives-et-moyens-dagir.pdf

Partie 2: Un guide pour décarboner le secteur

https://www.carbone4.com/files/wp-content/uploads/2020/04/Carbone-4-Referentiel-NZI-avril-2020.pdf

https://www.carbone4.com/files/Net_Zero_Initiative_for_Apparel_and_Footwear_Publication_Guidance_on_avoided_emissions.pdf?_ga=2.141092852.778869282.1711622497-1281663496.1699959656&_gl=1*1ondpr7*_ga*MTI4MTY2MzQ5Ni4xNjk5OTU5NjU2*_ga_DDFFFJ3G7F*MTcxMTYzNjg1Ny4zMi4xLjE3MTE2MzY4NzMuNDQuMC4w

Partie 3 : Concevoir une mode plus durable

https://www.carbone4.com/files/Net_Zero_Initiative_for_Apparel_and_Footwear_Publication_Guidance_on_avoided_emissions.pdf?_ga=2.141092852.778869282.1711622497-1281663496.1699959656&_gl=1*1ondpr7*_ga*MTI4MTY2MzQ5Ni4xNjk5OTU5NjU2*_ga_DDFFFJ3G7F*MTcxMTYzNjg1Ny4zMi4xLjE3MTE2MzY4NzMuNDQuMC4w

Engager une stratégie climat

Contactez nos équipes d’experts pour définir les objectifs climatiques
de votre entreprise.